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 Marche funeste

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Aldara
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Aldara


Nombre de messages : 555
Date d'inscription : 04/07/2007

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MessageSujet: Marche funeste   Marche funeste Icon_minitimeSam 23 Fév - 17:29

Elle marche, lentement, comptant ses pas, anticipant déjà sur ce qu'elle va voir, entendre. La côte n'en finit plus, elle a le souffle court, réchauffant ses mains dans son châle. Le billet contre son coeur l'accompagne, laisser-passer chez les moines, espère-t-elle... Au loin elle distingue l'austère bâtiment qui se détache dans la brume du matin naissant. Son voyage arrive à son terme, son calvaire commence.

La porte est énorme, aux proportions démesurées. Une grille de fer la griffe, petite comme un trou de souris.

La Rouge cogne sur le bois, le coeur battant, préparant déjà ses mots.
Derrière la grille, un oeil apparait et une voix questionne "Qu'est-ce que vous voulez? Le couvent est un peu plus loin"

Elle déplie le billet encore chaud de son sein et le présente d'une main tremblante à l'oeil.
Je suis attendue par Père Farregio... Je viens pour Messire Dirix... Je viens le chercher...

La voix bougonne, hésite, soupire. Finalement un loquet grince, la lourde porte tremble et finit par s'ouvrir.
La voix et l'oeil ne font plus qu'un, un moine encapuchonné, dont le visage reste une ombre et soudain un doigt se pointe vers une petite chapelle.
"Le Père Farregio est là-bas. Mais faites vite! Les femmes sont interdites ici!"

La jeune femme resserre son châle, tire machinalement sur son voile pour mieux cacher toute trace de féminité. Norf! Elle a bien fait de ne pas encore vouloir le laisser choir!

Son pas sur le gravier résonne, en saccades régulières. Elle n'est pas à l'aise ici. Au milieu d'hommes. Au sein même de la spiritualité aristotélicienne. Elle, l'impie, l'assassine, la morte vive...

La petite chapelle est austère, à l'image du lieu, de la porte, du moine. Un homme, de dos, penché sur un livre énorme, psalmodie en basculant son corps d'avant en arrière. Il est à genoux, à même le sol, dans sa robe de bure trop légère pour la saison. Sur le côté, une grande table nue, recouverte d'un drap blanc.

Aldara ne sait que faire. Elle toussote légèrement pour faire état de sa présence. L'homme se fige, se tait, se retourne lentement, se relève, s'avance vers elle. Son visage est blême, ses mains toujours jointes, ses yeux inquiets.
Dame Aldara je suppose... Soyez la bienvenue, malgré les circonstances. Je... hum... Il y a un problème...

La Rouge fronce les sourcils, un ... problème...?
**********
Il s'avance vers la dame, encore sous le coup de l'émotion. Il ne comprend pas tout, mais a confiance en la justice de son Seigneur. Plus il approche et plus il regarde la grande silhouette noire, voilée, qui semble à son aise comme un chien dans un jeu de quille.
Il n'est pas ravi non plus de sa présence ici. Une femme chez les moines... C'était bien pour respecter la parole faite à un mourant qu'il l'avait laissé entrer.

Dame Aldara je suppose... Soyez la bienvenue, malgré les circonstances. Je... hum... Il y a un problème... Mais venez, avancez-vous un peu dans la lumière, j'ai quelque chose pour vous...

Il fouille dans la poche de sa robe marron, extirpe un papier un peu froissé et le tend à la dame.

Messire Dirix a eu le temps d'écrire cela avant de nous livrer son dernier souffle. Etant donné les circonstances, j'ai préféré attendre votre arrivée plutôt que de vous l'envoyer. Prenez votre temps, je vais vous laisser...


Un signe de croix en guise de salut et voilà le petit homme dehors, laissant la femme, toujours dubitative dans la petite chapelle glaciale.

Citation:
Ma tendre amie, Mon Aldara, Ma Belle au goût de miel,

Si tu reçois ce billet, c'est que je ne suis plus parmi vous. J'ai tenté pourtant, je te le jure de lutter contre cette fatigue qui m'a pris le corps et le coeur... Oui mais voilà, mes yeux se sont brûlés à ton nouveau bonheur, ils n'ont cessé de me dévorer le visage à chaque fois que je t'ai revue. Oh ne va pas croire que je t'en veux! Je suis heureux pour toi et pour... lui. Ce n'est pas ta faute, juste la mienne. Tu t'es offerte à moi et je t'ai repoussée, par fierté, par orgueil et me voilà aujourd'hui chez les moines, à attendre comme une délivrance que la Mort vienne me cueillir...
Je regrette ce que je t'ai dit sur le bébé, je regrette aussi mes paroles sur Ellya, je voudrais que ce jour ne fut jamais. Je regrette aussi de t'avoir fait croire que j'étais mort, à Loches, par couardise, pensant pouvoir vivre loin de toi... J'espère que tu me pardonneras et te souhaite tout le bonheur possible avec ton fiancé. Qu'il t'épouse et te rende mère, une mère, une vraie, porteuse d'un enfant chéri et désiré...
J'emporte un bout de toi avec moi, si tu le permets; mon laisser-passer chez les Anges...

Dirix, qui t'aime tant
**********
Elle ne voit plus bien clair lorsque ses yeux arrivent en bas de la lettre. Elle replie le billet qu'elle colle sur son coeur, cherchant du regard quelque chose qui lui rappelle la blonde cannelle de Dirix...

Quelques minutes s'écoulent avant qu'elle ne parvienne à se reprendre. Certes le moine avait bien fait d'attendre qu'elle arrive pour lui remettre ceci mais qu'avait-il dit déjà?... "Il y a un problème"... Cette lettre constituait-elle un problème?... Assurément non...

Elle rejoint la porte de la chapelle, appelant au dehors "Mon Père?... J'ai ... j'ai fini, vous pouvez revenir... Expliquez-moi quel est le... problème!"

Une silhouette sombre se rapproche alors que quelques flocons étiolent sa robe.
**********
Il se secoue un peu, comme ferait un chien, enlève sa capuche, se signe à nouveau en évitant de regarder la dame de trop près.
Il commence à neiger... L'hiver n'est pas fini.

Il meuble, ne sait comment lui dire, ne sait même s'il croit en ce qu'il va lui dire...

Hum... alors voilà... (signe de croix)Vous voyez cette table là, sur laquelle repose un drap blanc? (il attend qu'elle regarde en direction de son doigt, puis qu'elle hoche la tête)Et bien... Hum, c'est ici que... enfin que reposait votre ami.
J'ai moi-même constaté son décès, vous savez... Je l'ai veillé toute la nuit qui a suivi son dernier souffle. (signe de croix) Et puis... au lever du soleil..., alors que je priais pour son âme, ici même (il montre l'autel, qu'un immense crucifix surplombe), je... j'ai été ébloui, j'ai entendu un son étrange, comme un POUFFF et quand je me suis retourné... la table était vide! (signe de croix) VIDE!!!
Immédiatement j'ai regardé la porte, mais rien, elle était toujours fermée. J'étais encore sous le choc quand j'ai entendu un cri au dehors. Je suis sorti précipitamment et là, j'ai trouvé notre petit Auguste, un pauvre garçon abandonné devant la porte du monastère en plein hiver, enfin bref! Auguste criait, il pleurait, se tapait la poitrine, montrant du doigt l'Est... (signe de croix) Quand je me suis approché pour le réconforter, il m'a dit "Mon Père, Mon Père! Le m'ssieu, le m'ssieu si fatigué! Il est parti! Là-bas! Il est passé à côté de moi, m'a souri, il a passé sa main dans mes cheveux, j'étais pétrifié! Et puis il est parti!" (signe de croix) je sais... c'est
invraisemblable... Je n'ai pas d'explication ... je vous dis ce que je sais... Je... enfin, je n'ai jamais vu cela...


Il se tait enfin, un peu essoufflé, la main tremblante, esquissant un nouveau signe de croix. Il la regarde, elle semble elle aussi pétrifiée, encore plus blanche dans sa robe sévère.
**********
Plus le récit avance et plus Aldara fixe le petit homme, croyant qu'il se moque d'elle. Elle écarquille les yeux, fronce les sourcils, ouvre la bouche toute grande, secoue la tête... Et puis ces signes de croix sont exaspérants! Elle a envie de stopper son geste à chaque fois mais se retient, ne serait-ce que parce que c'est un homme.
Aux derniers mots du religieux, elle ne sait plus quoi penser. Est-il fou? Fabrique-t-on ici une liqueur si forte qu'elle fait délirer? Est-ce une blague? Un piège? (elle repense au père Anthelme, à Loches... Avait-il des connaissances chez les moines Berrichons...?)
Mais surtout, Dirix est-il vraiment MORT??? Légitimement, on pouvait se poser la question. "J'ai moi-même constaté sa mort" avait dit le moine, mouais... comment donc? Etait-il médecin? Apothicaire?

Peu à peu, après la surprise et l'incrédulité, le visage de la Rouge s'éclaire d'une lueur d'espoir. Et s'il était toujours VIVANT???!!!
Elle toussotte, regarde le moine à travers la grille de son voile et souffle:

Bien. Je vois... Par où est-il parti avez-vous dit? Vers l'Est? Et bien c'est aussi la direction que je vais prendre. Merci de vostre accueil et de tout ce que vous avez fait pour mon ami.

Elle incline le menton, s'approche de la grande table nue ou repose toujours le linceul froissé, le porte à son nez en fermant les yeux. Oui, sans nul doute, Dirix avait touché ce tissu. Elle le roule en boule sans même demander l'autorisation au religion et le fourre dans sa besace.

Dans un silence de velours noir, elle quitte la petite chapelle, repasse devant le moine bougon de l'entrée et sort du monastère, tachetée déjà de flocons blancs. Elle lève les yeux, cherchant le soleil, et prend la direction de l'Est en marmonnant "Dirix, vif ou mort, je te retrouverai..."
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