Comme souvent La Rouge avait fait confiance à son flair. Une jeune fille, qui semblait un peu perdue, pas vraiment là mais pas vraiment ailleurs non plus. Quelques mots échangés dans une taverne de Saint Aignan, quelques sourires, une connexion qui se fait et voilà les deux femmes jetées sur les chemins.
Elle s'appelait Petrasis, disait être chez elle sur les routes, parlait d'un rendez-vous diplomatique, de gens à rejoindre, de vies à vivre, intenses, pleines...
Aldara aimait les gens passionnés, elle en avait aimé plusieurs, perdu beaucoup. Mais elle ne perdait jamais une occasion de se lier à ces fougueux de passage. Ce n'était pas pour rien qu'elle avait pris le nom d'Helequin -la passion, en ancien français- le jour de ses épousailles!
Aussi, après avoir réglé quelques affaires, annoncé son départ à son fillot, Nimrod, qui lui avait crevé le coeur par l'eau de ses yeux, elle s'était mise en marche, direction Loches.
Loches.
Horribles souvenirs.
Un seul jour en la funeste cité était bien suffisant, elles avaient repris bien vite la route direction Chinon.
La demoiselle avait un cheval. Un canasson plutot, à la croupe pointue qui meurtrissait l'arrière train d'Aldara, plus guère habituée aux longues chevauchée à deux. Chaque galop était une épreuve. Chaque trot un supplice. Elle se cramponnait comme elle pouvait aux côtes de Petrasis qui semblait très à son aise, telle une Amazone chevauchant sa monture.
A peine arrivée à Chinon, descendant dans une grimace hilarante, La Rouge attrapa les rennes de l'animal, cherchant du regard une écurie bien fournie en avoine.
Allez mon joli, on va manger hein, bien manger, beaucoup manger... Valaaaaaaaaaaaaaaaa, c'est bien mon joli, allez mange, hein! Bon Petrasis, on... Norf, la voilà déjà partie au tribunal! Petraaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaa, attends moiiiiiiiiiii!
Se tenant les reins, Aldara clopine derrière la silhouette fine d'une jeune fille, assoiffée de connaissances, future avocate, à n'en pas douter...